Note pour la période des questions : TRAVAIL FORCÉ (CHAÎNES D’APPROVISIONNEMENT MONDIALES)
About
- Numéro de référence :
- LAB-JUN2022-016
- Date fournie :
- 22 juin 2022
- Organisation :
- Emploi et Développement social Canada
- Nom du ministre :
- O'Regan, Seamus (L’hon.)
- Titre du ministre :
- Ministre du Travail
Enjeu ou question :
Le Canada introduira-t-il, comme les États-Unis, une interdiction sur l'importation de toutes les marchandises en provenance de la région du Xinjiang en Chine ?
Réponse suggérée :
• Le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement est un problème complexe qui exige beaucoup de travail de la part des gouvernements, de l'industrie et d’autres parties prenantes pour être résolu.
• En juillet 2020, le Canada est devenu le deuxième pays au monde après les États-Unis à interdire l'importation de biens produits par le travail forcé, quel que soit le pays d'origine.
• L'interdiction d'importer du Canada en vertu du Tarif des douanes est basée sur les envois et les décisions sont prises au cas par cas sous le pouvoir d’exécution de l'ASFC. Les États-Unis ont également introduit leur « Uyghur Forced Labour Prevention Act », qui interdit toutes les marchandises en provenance du Xinjiang, mais permet aux importateurs de demander une exemption s'ils peuvent prouver que les marchandises n'ont pas été fabriquées avec du travail forcé.
• Le Canada collabore étroitement avec les États-Unis et d'autres partenaires et organisations internationales pour renforcer les efforts mondiaux visant à éliminer le travail forcé.
• Les interdictions d’importation ne sont qu'un outil dans la boîte à outils pour lutter contre le travail forcé. Le Canada s’attarde à cet enjeu grâce à une combinaison de mesures, notamment des exigences fédérales en matière d'approvisionnement, une nouvelle stratégie de conduite responsable des entreprises, et des dispositions exécutoires sur le travail dans les accords commerciaux.
• Cela s'ajoute à notre engagement à faire progresser la législation pour éradiquer le travail forcé des chaînes d'approvisionnement canadiennes.
• Le gouvernement travaillera avec les parlementaires pour réaliser cet engagement, à la suite du vote unanime à la Chambre plus tôt ce mois-ci pour étudier le projet de loi S-211, et l'intention du gouvernement de proposer des modifications pour renforcer les bases d’une loi sur les chaîne d'approvisionnement.
• En janvier 2021, le Canada a annoncé plusieurs mesures commerciales pour lutter contre les violations des droits de la personne, y compris le travail forcé impliquant des Ouïghours et d’autres minorités ethniques au Xinjiang. Il s’agit notamment d’une déclaration d’intégrité spécialisée sur le Xinjiang pour les entreprises canadiennes; d’un avis aux entreprises concernant les entités liées au Xinjiang; de meilleurs conseils aux entreprises canadiennes; de contrôles à l’exportation; d’une sensibilisation accrue aux pratiques commerciales responsables liées au Xinjiang; et d’une étude sur le travail forcé et les risques liés à la chaîne d’approvisionnement qui est maintenant publiée sur le site web d’Affaires mondiales Canada.
Si vous êtes interrogé sur la S-204 Loi modifiant le Tarif des douanes (marchandises en provenance du Xinjiang, introduite par le Sénat) ou sur d'autres projets de loi devant le Parlement, à l'exception de la S-211 :
• Les ministères concernés analysent actuellement le projet de loi S-204 [projets de loi C-262/263] et suivront son [leur] évolution.
• Je ne suis pas en mesure de commenter par rapport à la position du gouvernement quant à cette proposition législative en ce moment.
Contexte :
Interdiction d’importation de biens faits à partir du travail forcé au Canada
• En vertu de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM), l'une des obligations est que chaque partie interdise l'importation de biens qui ont été produits en totalité ou en partie par le travail forcé ou obligatoire.
• Par conséquent, le Canada a modifié le Tarif des douanes et l’annexe du Tarif des douanes afin d’inclure une interdiction de l’importation des marchandises qui sont extraites, fabriquées ou produites, entièrement ou en partie, par le travail forcé. Cette modification a pris effet à l’entrée en vigueur de l’ACEUM, le 1er juillet 2020.
• Bien que l’interdiction du travail forcé a été mise en œuvre pour répondre à une obligation de l’ACEUM, elle s’applique à toutes les importations, quelle que soit leur origine.
• Le Tarif des douanes relève de la compétence du ministre des Finances.
• L'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) est responsable de l'administration et de l'application du Tarif des douanes. EDSC-Travail fournit son soutien en effectuant des recherches et des analyses sur le risque de travail forcé pour des plaintes ou des allégations spécifiques. L'ASFC peut utiliser ces renseignements, et d'autres sources d'information pour identifier et intercepter les envois contenant des marchandises susceptibles d'être produites par le travail forcé.
• La détermination de la probabilité que des biens aient été produits par le travail forcé nécessite des recherches, des analyses et des informations complémentaires importantes. La recherche portant sur des allégations de travail forcé dans des chaînes d'approvisionnement mondiales à plusieurs niveaux est un processus complexe et long, et exige que la diligence raisonnable soit appliquée à chaque étape. L'analyse des risques pour évaluer la probabilité qu’un envoi spécifique puisse contenir des biens produits par le travail forcé est effectuée au cas par cas, sur la base des informations et des analyses disponibles.
• L'ASFC, EDSC et d'autres ministères fédéraux travaillent ensemble pour faire progresser l'opérationnalisation de l'interdiction d'importation de travail forcé au Canada et pour évaluer divers modèles utilisés dans d'autres juridictions pour lutter contre l'exploitation par le travail.
Autres initiatives du gouvernement du Canada pour lutter contre le travail forcé
• Le gouvernement s'est engagé à déposer un projet de loi sur les chaines d’approvisionnement, comme en témoigne l'engagement pris dans la lettre de mandat de décembre 2021 du ministre du Travail, conjointement avec le ministre de la Sécurité publique, la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement et la ministre du Commerce international, de la Promotion des exportations, de la Petite Entreprise et du Développement économique. Les responsables du Programme du travail travaillent avec d'autres ministères concernés pour faire avancer le travail politique sur cet engagement, y compris en ce qui concerne divers projets de loi d'initiative parlementaire (projets de loi S-211 et C-243) qui visent à lutter contre l'exploitation dans les chaînes d'approvisionnement.
• Le Canada négocie des dispositions complètes et exécutoires sur le travail dans les accords de libre-échange, qui obligent les parties à affirmer leurs engagements en vertu de la Déclaration de 1998 de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et à ratifier et mettre en œuvre les huit conventions fondamentales de l'OIT, dont la Convention sur le travail forcé (n° 29) et la Convention sur l'abolition du travail forcé (n° 105).
• Le Canada fournit également une assistance technique aux pays partenaires pour favoriser le respect des engagements énoncés dans les accords de libre-échange, y compris ceux liés aux droits et principes du travail reconnus internationalement (comme l'élimination de toutes les formes de travail forcé ou obligatoire).
• En 2021, Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) a mis à jour son Code de conduite pour l'approvisionnement afin d'inclure les attentes voulant que les fournisseurs fédéraux respectent les droits de la personne et du travail. SPAC a également élaboré de nouvelles clauses contractuelles contre le travail forcé pour permettre la résiliation d'un contrat si les marchandises ne sont pas dédouanées en raison de violations de l'interdiction du travail forcé. Plus récemment, SPAC a chargé « Rights Lab » de mener une évaluation des risques afin de déterminer quelles marchandises sont les plus susceptibles d'être produites par le travail forcé et la traite des êtres humains afin d'éclairer les travaux futurs dans ce domaine.
• En avril 2022, Affaires mondiales Canada a publié une stratégie mise à jour sur la conduite responsable des entreprises, qui définit les priorités du gouvernement du Canada pour aider les entreprises canadiennes actives à l'étranger à intégrer des pratiques commerciales responsables de premier plan dans leurs opérations, y compris tout au long de leurs chaînes d'approvisionnement, et pour aider à l’atténuation des risques potentiels, quels que soient leur taille, leur secteur ou l'étendue de leurs activités.
Projets de loi S-211, C-243, C-262 et C-263
• Au Parlement, le projet de loi public du Sénat S-211 (Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d'approvisionnement) et les projets de loi d'initiative parlementaire C-243 (Loi sur la fin du recours au travail forcé et au travail des enfants dans les chaînes d'approvisionnement), C-262 (Loi sur la responsabilité des entreprises de protéger les droits de la personne) et C-263 (Loi sur la conduite responsable des entreprises à l'étranger) ont été déposés pour proposer :
o de nouvelles mesures pour lutter contre l'exploitation dans les chaînes d'approvisionnement (les projets de loi S-211 et C-243 sont axés sur le travail forcé et le travail des enfants, et le projet de loi C-262 propose un régime plus large de diligence raisonnable en matière de droits de la personne); et
o la nomination d'un commissaire à la conduite responsable des entreprises à l'étranger pour s'assurer que les entités se conforment aux obligations de déclaration de diligence raisonnable (projet de loi C-263).
• Les projets de loi sont à différentes étapes du processus législatif :
o Le projet de loi S-211, qui a été présenté par la sénatrice Julie Miville-Dechêne, a terminé son examen au Sénat et terminé l'étape de la deuxième lecture à la Chambre des communes le 1er juin 2022. Le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent des affaires étrangères et internationales Développement (FAAE) avec consentement unanime.
o Le projet de loi C-243, qui a été présenté par le député libéral (MP) Marcus Powlowski, a terminé sa première lecture à la Chambre le 8 février 2022. Il est peu probable qu'il commence sa deuxième lecture à la Chambre en septembre 2022, étant donné sa similitude avec Projet de loi S-211.
o Les projets de loi C-262 et C-263, qui ont été présentés respectivement par les députés du Nouveau Parti démocratique Peter Julian et Heather McPherson, ont tous deux terminé leur première lecture à la Chambre le 29 mars 2022.
Kilgour c. Canada (le procureur général) – T-259-21; A-102-22
• Le 6 décembre 2021, la Cour fédérale du Canada a entendu la demande de contrôle judiciaire de Kilgour c ASFC (PG Canada) T-259-21. L'enjeu était la réponse de l'ASFC à la demande du demandeur d'interdire l'importation de marchandises produites au Xinjiang, en Chine, à moins qu'il n'y ait une preuve claire et convaincante que les marchandises n'ont pas été produites en tout ou en partie par le travail forcé. L'ASFC a indiqué que l’agence n'avait pas le pouvoir d'accéder à la demande. Le Uyghur Rights Advocacy Project (URAP), une organisation canadienne qui vise à promouvoir les droits du peuple ouïghour, est intervenu dans l'affaire, faisant valoir que l'ASFC a le pouvoir d'interdire de manière générale l'importation de marchandises produites au Xinjiang au motif que ces biens ont été produits en tout ou en partie par le travail forcé.
• L'URAP a également fait valoir que le pouvoir de l'ASFC devrait être interprété à la lumière des obligations juridiques internationales du Canada, y compris les conventions de l'OIT sur le travail forcé (n° 29 et n° 105) et les obligations de l'accord Canada-États-Unis-Mexique.
• Le 5 avril 2022, la Cour fédérale a rendu sa décision, rejetant le contrôle judiciaire pour tous les motifs, concluant que l'interprétation du Tarif des douanes par l'ASFC était raisonnable. Les demandeurs ont interjeté appel. Le dossier est maintenant nommé Reisdorf, Maria et al v AG (A-102-22).
L'interdiction d'importer du travail forcé aux États-Unis
• L'interdiction d'importer du travail forcé aux États-Unis, en vertu de l'article 307 de la loi douanière des États-Unis, est en place depuis les années 1930 et est mise en œuvre par le U.S. Customs and Border Protection (CBP).
• Cependant, en 2016, le gouvernement américain a supprimé « l'exception de la demande de consommation », qui jusque-là autorisait des exceptions à l'interdiction d'importer du travail forcé s'il y avait un besoin intérieur pour le produit. Les mesures d'application ont considérablement augmenté depuis 2016, avec plus de 1400 envois retenus en 2021.
• Le CBP peut émettre une Withhold Release Order
(WRO) et retenir un envoi lorsqu'il a des motifs raisonnables de soupçonner que la marchandise a été fabriquée avec du travail forcé.
• Le CBP peut émettre une conclusion et saisir un envoi lorsqu'il existe des preuves qui démontrent de manière concluante que la marchandise a été fabriquée avec du travail forcé.
• En vertu du Tariff Act
, le CBP peut imposer une sanction civile aux importateurs pour l'importation de marchandises contraires à la législation américaine. Le CBP n'a jusqu'à présent prononcé qu'une seule sanction (contre une entreprise important des produits à base de stévia de Chine, après qu'une WRO ait été émise contre ce produit).
La “Uyghur Forced Labor Prevention Act”
• Le 23 décembre 2021, les États-Unis ont adopté la loi sur la prévention du travail forcé ouïghour (UFLPA).
• Cette nouvelle loi est entrée en vigueur sous le régime des douanes et de la protection des frontières des États-Unis (CBP) le 21 juin 2022.
• L'UFLPA crée une présomption réfutable selon laquelle tous les biens produits (en tout ou en partie) dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang (XUAR), ou les biens produits par certaines entités, sont fabriqués avec du travail forcé et sont donc interdits d'importation aux États-Unis, à moins que le commissaire du CBP des États-Unis n'accorde une exception.
• Pour réfuter la présomption, un importateur doit disposer de "preuves claires et convaincantes" que l'importation n'a pas été effectuée, en tout ou en partie, avec du travail forcé (nonobstant le lien avec XUAR ou une entité répertoriée) et que l'importateur s'est conformé aux les directives du gouvernement américain en matière de diligence raisonnable.
• L'UFLPA répertorie les secteurs hautement prioritaires comme le coton, les tomates et le polysilicium. Ces secteurs nécessiteront des stratégies d'application spécifiques au secteur.
• L'UFLPA modifie également la loi ouïghoure sur la politique des droits de l'homme de 2020 pour souligner que des sanctions peuvent être imposées en raison de « [s]erious violations des droits de l'homme en rapport avec le travail forcé » liées au XUAR. D'ici le 21 juin 2022, le président est tenu de soumettre un rapport initial au Congrès identifiant les personnes non américaines faisant l'objet de sanctions. Ces personnes seront soumises au blocage des avoirs, comme le prévoit la loi sur les pouvoirs économiques d'urgence internationaux, ainsi qu'à la révocation ou au refus de visas pour entrer aux États-Unis.
• Le CBP a publié des directives opérationnelles pour les importateurs le 13 juin 2022 et le FLETF a publié sa stratégie d'application le 17 juin 2022.
Renseignements supplémentaires :
aucun